OCTOBRE ROSE
Comment comprendre que tu es une femme ?
C’est étrange de se le demander, n’est-ce pas ?
Qu’est-ce que cela veut dire ?
En regardant le dictionnaire Russe à la définition du mot femme on lit :
1. Une personne de sexe opposé à un homme, celle qui donne naissance aux enfants et les allaite.
2. Une personne de sexe féminin qui a contracté une relation mariée.
Pour cette même occurrence, le dictionnaire français Larousse propose :
1. Être humain du sexe féminin.
2. Adulte de sexe féminin, par opposition à fille, jeune fille : La voilà une femme
3. Épouse : Il nous a présenté sa femme.
4. Adulte de sexe féminin, considéré par rapport à ses qualités, à ses défauts, à son activité, à son origine, etc. : Femme du monde. Femme de lettres.
5. Peut être suivi ou précédé d'un nom de profession ou de fonction de genre masculin : Une femme ingénieur. Un professeur femme.
6. Suivi d'un nom apposé, désigne une personne de sexe féminin qui a toutes les caractéristiques impliquées par le sens du nom apposé : Une femme enfant, femme de ménage, femme de service, femme fatale, femme au foyer, Des femmes-objets …
Il y a tellement de conditions pour être une femme dans nos sociétés, de nombreux clichés qui varient mais reste inépuisables.
En Russie, selon la définition du dictionnaire, je ne suis pas une femme, n’étant pas mariée et n’ayant pas allaité mon enfant.
Quand j'étais petite, j’entendais parfois des histoires absolument terribles sur l'existence de femmes à qui on avait enlevé les seins à cause du cancer.
C’était un sujet tabou et très honteux. Personne n’en parlait, encore moins les hommes, c’était considéré comme une humiliation. Il n’y avait que des rumeurs et des gémissements terribles.
Les femmes qui avaient subi une mastectomie étaient considérées comme des monstres. Elles n’avaient aucun soutien, aucune aide ni écoute pour surmonter le regard que la société russe portait, ou plutôt ne voulait plus porter sur elles.
Ces femmes ne pouvaient plus aller dans les bains publics ou à la piscine parce que les autres femmes ne les acceptaient pas non plus, comme si c’était contagieux.
Près de 30 ans se sont écoulés et ces histoires que j’entendais enfant ont ressurgie après un appel de ma mère me racontant un reportage vu à la télévision russe. Une femme ayant subi une mastectomie pour un cancer du sein a refusé de se faire poser des implants. Sa décision de s’opposer aux pressions sociétales a été largement discuté et commenté pour arriver à la conclusion que cette femme appartenant désormais à la catégorie transgenre. Or, selon la loi Russe, les personnes transgenres ne peuvent pas avoir d’enfants et encore moins les élever. Les enfants de cette femme lui ont été enlevés et sont désormais dans un orphelinat.
Sidérée par cette histoire, j'ai commencé à chercher des informations sur des sites russes
Toutes les publicités et campagnes incitent à la reconstruction mammaire par prothèses ou par implants après un cancer du sein.
Rien sur les autres possibilités, comme l’idée d’une reconstruction non-chirurgicale ( tatouages…) car ce n’est pas si simple de faire ce choix face à soi-même, ses proches, les médecins ou la norme esthétique et sociale.
Rien pour accompagner cet événement vécu comme une « mutilation », une attaque contre l’image corporelle, l’intégrité physique, la féminité, la capacité de séduction
Rien, sinon un désert de honte et de solitude.
Enfin, selon la loi russe, vous ne pouvez pas retirer un sein sans prescription médicale, par exemple si vous souhaitez vous protéger à l'avance ou si vous avez peur. Vous devez fournir uniquement une justification médicale.
Dans mon travail, j'ai réalisé une série de dessins de femmes qui cachent leur poitrine ou leur visage et dont les seins ont été partiellement ou totalement enlevés.
J'essaie de les aider à s'accepter, de leur montrer la diversité de la beauté et la possibilité d'être le genre de femme qu'elles souhaitent.
Non réduites à une définition du dictionnaire, non soumises à l’opinion publique et libres de faire un choix sans peur ni contrainte.
Je ne peux pas imaginer la force qu’il faut pour vaincre la maladie, et encore moins pour surmonter les pressions de la société.
Est-ce seulement les seins qui définissent une femme ?
Le poids moyen d’un sein est d’environ 400 grammes, est-ce que 400 grammes de chair doivent être déterminants dans la vie d’une femme ?
Et pour la femme elle-même ?
Le dictionnaire de langue russe est un dictionnaire explicatif. La première édition a été publiée sous la direction Sergueï Ozhegov en 1939. Cette édition contenait environ 57 000 mots.